samedi 13 septembre 2014

Louis Hémon (II)



Après un séjour à Québec, Hémon s'installe à Montréal et prend un poste de commis d'assurances. Il écrit toujours des articles pour son journal, mais cette fois-ci, prend son inspiration dans la culture québécoise. Le 15 juin 1912, il part pour la région du Saguenay, celle des pionniers. Il passe par La Tuque, par Roberval et par Péribonka. Là, il fait la connaissance de Samuel Bédard, qui l'embauche en tant qu'ouvrier agricole.

Aux yeux des autochtones, Hémon semble un être bien bizarre, capable de travailler pour rien, parlant peu, écrivant beaucoup dans le carnet qu'il promène partout, n'allant enfin jamais à la messe. Finalement, il s'installe de l'autre côté du lac Saint-Jean, à Saint-Gédéon et c'est là qu'il rédige la première version du livre qui lui assurera la célébrité : "Maria Chapdelaine."


Au printemps 1913, il regagne Montréal et, tout en dactylographiant son roman, travaille en qualité de traducteur. Le 26 juin, le manuscrit est fin prêt et expédié au "Temps", à Paris. Louis Hémon part alors pour l'Ouest canadien car il veut participer aux moissons. Il s'arrête au village de Chapleau, en compagnie d'un camarade de route d'origine australienne et, le 8 juillet 1913, les deux hommes sont happés par un train. L'accident demeure toujours inexplicable.

Curieux destin que celui de "Maria Chapdelaine" ! Publié une première fois en feuilleton dans "Le Temps", entre janvier et février 1914, le roman ne retient pas l'attention du public. En 1916, la version légèrement expurgée qui sort à Montréal grâce aux efforts conjugués de Louvigny de Montigny, de Félix Hémon et du gouvernement canadien, ne fait pas mieux. En revanche, en 1921, le jeune éditeur Bernard Grasset obtient avec lui un succès commercial considérable.

Comme il est d'usage, les autres romans de Hémon sont publiés dans la foulée : "Colin-Maillard", en 1924, met en scène un rebelle irlandais ; "Battling Malone", en 1926, raconte l'ascension et la déchéance d'un boxeur irlandais ; "Monsieur Ripois & la Némésis", qui ne sortira qu'en 1950, a pour personnage principal une sorte d'anti-héros, un jeune homme qui utilise les femmes pour se hisser au faîte de l'échelle sociale. A mille lieues de "Maria Chapdelaine", ces trois romans se fondent sur des conflits sociaux.


La date de parution de "Monsieur Ripois ..." s'explique par la volonté de ne pas assombrir l'image de "jeune homme de bonne famille" faite à son auteur. Contrairement à ce qu'on a voulu faire de lui, Louis Hémon était en effet en rupture avec les traditions bourgeoises et catholiques de son milieu. "Maria Chapdelaine" subira longtemps, elle aussi, le même sort. La société québécoise traditionnelle et immobiliste, très attachée au catholicisme, verra dans ce roman une ode à ses valeurs alors que, si on prend la peine de lire au delà de l'intrigue minimaliste et assez proche du genre "terroir", on peut penser que Louis Hémon y raille avec férocité les bien-pensants - même si, à la fin du livre, l'héroïne accepte d'épouser l'un d'eux.

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