samedi 27 septembre 2014

Alexander Pope (II)

En mai 1709, "The Pastorale" est publiée dans la sixième partie des "Poetical Miscellanies" de Tonson. Elle va apporter à son auteur la gloire immédiate et sera suivie d'un "Essay on Criticism" qui, deux ans plus tard, reçoit lui aussi un excellent accueil.

A la même époque, Pope se lie d'amitié avec les écrivains tories que sont John Gay, Jonathan Swift, Thomas Parnell et John Arbuthnot. Tous ensemble, ils fondent un club satirique qu'ils baptisent le "Scriblerus Club." L'objectif de la confrérie est de tourner en ridicule l'ignorance et la pédanterie, symbolisées par un universitaire imaginaire nommé Martinus Scriblerus.

Pope devient également l'ami des écrivains whigs Joseph Addison et Richard Steele.

En 1713, il publie "Windsor Forest" dont le succès est éclatant.

Pope collabore avec Addison pour la pièce "Cato" et écrit plusieurs articles pour "The Guardian" et "The Spectator." Il se lance dans la traduction de l'"Iliade", opération des plus minutieuses qui lui prendra cinq ans.
En 1714, s'ouvre une crise politique provoquée par la mort de la reine Anne, laquelle ne laisse pas d'héritiers directs. La succession au trône se voit donc âprement disputée par la maison de Hanovre et par les Jacobites. Ces derniers tentent même de se révolter dès l'année suivante. Comme ses co-religionnaires, Pope se voit suspecté d'apporter son soutien à la cause jacobite pro-catholique mais, ainsi que l'indique l'historien Maynard Mack, "ce que Pope pensait de ces problèmes, il ne l'a jamais confié à qui que ce soit." Quoi qu'il en soit, les amis tories de Pope pâtissent de cette crise et Henry St John, vicomte Bolingbroke, très proche du poète, doit s'exiler en France.

Entre 1716 et 1719, Pope habite chez ses parents, Mawson Row, Chiswick. De nos jours, une plaque bleue, apposée sur la maison de brique rouge, devenue "Mawson Arms", rappelle la mémoire du poète.

La traduction d'Homère lui ayant rapporté pas mal d'argent, Pope s'achète une villa à Twickenham dès 1719. Il va y créer ses désormais célèbres grotte et jardins. La grotte est ornée d'albâtre, de marbre, de cuivre et de cristal. Cà et là, Pope fait poser des miroirs, embellissements fort onéreux pour l'époque. Il installe aussi une camera obscura afin de distraire ses visiteurs qui, de fait, viendront en masse. La découverte inattendue d'une source souterraine souligne encore la beauté du lieu par le clapotis apaisant de l'eau qui coule.

De nos jours, bien que le jardin et la maison n'existent plus depuis belle lurette, la grotte de Pope s'étend toujours sous la Radnor House Independant Co-ed School et est de temps à autre ouverte au public. 

 Ce fut le 15 mai 1711 que "An Essay on Criticism" sortit sans nom d'auteur officiel. Pope avait commencé ce poème très tôt dans sa carrière et consacré trois ans à l'achever. A l'époque de sa parution, le couplet héroïque constituait un genre poétique relativement nouveau et cette oeuvre est assurément le travail le plus ambitieux de son auteur. Il s'agit d'une tentative pour définir et affiner ses positions en tant que poète mais aussi en tant que critique. Le poème entend apporter une réponse à un débat en vogue : la poésie devait-elle insister sur le naturel ou bien suivre les règles artificielles et prédéterminées du passé classique ?

Le texte débute par une discussion sur les règles habituelles qui gouvernent l'art de versifier et sur lesquelles se prononce un critique. Pope commente les auteurs classiques qui ont prôné de telles normes et l'autorité dont ils se sont ainsi investi. Il évoque aussi les lois auxquelles un critique doit se soumettre lorsqu'il s'occupe de poésie et souligne l'importance de la fonction du critique dans l'aide qu'il pourrait apporter au poète s'il renonçait à attaquer systématiquement ses erreurs.

La dernière partie de "An Essay ..." met en valeur les qualités morales et les vertus qui font le bon critique. Pope le proclame : c'est aussi l'homme idéal.

En 1712, le poète britannique publie son poème le plus célèbre, "The Rape of the Lock / La Boucle de Cheveux Enlevée", dont il retravaille bientôt la première version et qu'il publie à nouveau en 1714. Dans un style à la fois épique et burlesque, il raille la querelle mettant aux prises Arabella Fermor (la "Belinda" du poème) et lord Petre qui lui a dérobé une bouche de cheveux sans sa permission. La satire se double cependant d'un intérêt véritable, proche de celui du voyeur d'ailleurs, pour le "beau-monde" du XVIIIème anglais.

Abordons maintenant "The Dunciad" qui, bien que publié là encore de manière anonyme, à Dublin, fut immédiatement attribué à Pope. Dans ce poème, l'auteur cloue au pilori du ridicule écrivaillons, scribouillards et autres imbéciles. Pour Mack, il s'agit là "de bien des manières, le plus grand acte de folie de toute l'existence de Pope." Chef-d'oeuvre certes, nul ne le conteste "mais le fruit est amer et cette amertume attira au poète l'hostilité de ceux dont il se raillait et de leurs sympathisants, hostilité qui devait poursuivre Pope toute sa vie ..." Il y eut même des menaces physiques. Selon sa soeur, Pope n'allait jamais se promener ni sans Bounce, son dalmatien, ni sans une bonne paire de pistolets chargés au fond de ses poches.

En 1731, paraît "Epistle to Burlington", qui traite de questions d'architecture et qui est le premier des quatre poèmes que, plus tard, on rassemblera sous le titre "Moral Essays." Ici, Pope s'en prend au goût détestable d'un aristocrate dénommé "Timon", sans autre précision. Cela suffit à ses ennemis pour clamer bien haut qu'il s'attaquait au duc de Chandos et à sa propriété de Cannons. C'était faux mais la rumeur nuisit beaucoup au poète.

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