Marcel Schwob est né, comme son nom
l’indique, dans une famille d’origine juive mais, ainsi que le nom ne
l’indique pas, cette famille avait de fortes sympathies laïques. Neuf
ans après la naissance du petit Marcel (en 1867), son père, Georges
Schwob, achètera d’ailleurs le principal journal républicain de la
région nantaise : « Le Phare de la Loire. »
Mais Schwob est aussi né sous le signe de la Littérature puisque sa famille fréquente Théodore de Banville, Théophile Gautier et beaucoup d’autres et que son oncle maternel, Léon Cahun, n’est autre que bibliothécaire en chef de la Bibliothèque Mazarine. Sont-ce ces auspices si favorables qui font du jeune garçon ce que nous appellerions un surdoué, capable de maîtriser l’allemand et l’anglais dès l’âge de 10 ans ? Devenu adulte, cet infatigable érudit s’intéressera de même autant à Henrik Ibsen qu’à la « Salomé » d’Oscar Wilde, aux poésies de Walt Whitman comme à celles de Maeterlinck, à Colette comme à Mallarmé.
En-dehors de son amour pour Marguerite Moreno, sa grande passion, celle qu’il conserva tout au long de sa courte vie – puisqu’il mourut à l’âge de 37 ans – et dont le virus lui avait été transmis par son oncle Cahun, demeura à François Villon et à son œuvre. Et ce n’est pas un hasard si son premier vrai livre, co-rédigé avec un ami qui devait se suicider quelques jours après la parution de l’ouvrage, s’intitule : « Etude sur l’argot français. » Un an plus tard, Schwob donnera à "La Revue des Deux Mondes" une biographie serrée du grand poète.
En parallèle, il correspond avec Robert-Louis Stevenson, dont il a lu la « Treasure Island » dans le texte avant de partir pour le service militaire. Ce roman, devenu un classique de la littérature américaine, lui a en effet laissé une impression ineffaçable. A tel point que, quelques années plus tard, il en assurera la première traduction dans notre langue. Lui-même commence à publier régulièrement, notamment dans « L’Echo de Paris » où se côtoient en cette fin de siècle Jean Lorrain, Mirbeau, Maupassant, Jules Renard – qui fit de Schwob l’un des personnages de son « Journal » - et bien d’autres.
1891 et 1892 peuvent être considérées comme des « années Schwob » en ce sens que l’écrivain sort alors et coup sur coup ses deux premiers recueils de contes : « Cœur double », dédié à Stevenson, et « Le Roi au Masque d’Or." Les textes qu’on y trouve sont marqués pour les uns au coin d’un réalisme qui prend ses sources dans la vie militaire menée par l’auteur à Vannes, au temps de son service ; ceux qui restent, où pointe l’oreille faunesque et sanglante du Fantastique, s’inspirent de textes antiques ou de chroniques judiciaires. L’influence de Edgar Allan Poe, celle aussi de Twain et, bien sûr, celle de Stevenson (lui-même auteur, on a trop tendance à l’oublier devant le formidable succès de « L’Ile au Trésor », de grandes nouvelles fantastiques) sont flagrantes.
1894 est aussi une autre « année Shwob », où paraît l’inclassable « Livre de Monelle », dont le succès fut extrême et qui, aux yeux de Colette, resta toujours le meilleur des recueils publiés par son grand ami. A la même époque hélas ! se manifestent les premiers symptômes de la maladie (gastrique ou intestinale, on ne sait trop) qui aura raison de Shwob en 1905. Pour maintenir le rythme de ses études (car, quelque part, il fut un perpétuel étudiant, toujours avide de lire plus et d’en savoir plus) comme celui de ses productions, peut-être détraqué sur le plan du sommeil, Schwob avait pris l’habitude – comme Jean Lorrain – de s’adonner à des drogues comme l’opium et l’éther. On pense aujourd’hui que cette addiction a joué dans les progrès foudroyants de sa maladie.
Alors qu’il travaille à la traduction de « Moll Flanders » de Daniel Defoë, Schwob, comme jadis pour « L’Ecornifleur » de Jules Renard, part en lutte pour que soit représentée une pièce du dramaturge élizabéthain John Ford. Ce qui lui donne l’occasion de rencontrer Marguerite Moréno, dont il tombe éperdument amoureux et qui deviendra son épouse en 1900.
En 1896, c’est « La Croisade des Enfants », hallucinant récit à plusieurs voix contant le tragique destin de ces enfants qui partirent pour les Croisades de l’an Mil et n’en revinrent jamais. L’accueil de la presse comme du public est excellent mais Schwob doit entrer à l’hôpital où il ne subira pas moins de cinq opérations particulièrement pénibles et qui ne parviendront à prolonger son existence que d’une dizaine d’années. A compter de ce jour, son addiction aux drogues devient complète. Pire : la bienheureuse morphine lui est désormais nécessaire.
Après son mariage, à l’aube du XXème siècle, Schwob entreprend un vaste tour du monde où, toujours, sa santé de plus en plus délabrée le rattrape. Contraint à de fréquents retours à Paris, il voit cependant les Samoas, l’Italie, la Suisse … Et puis, en 1905, c’est l’étape finale : Marcel Schwob meurt. Fait qu’il n’eût pas manqué de mentionner dans ses contes fantastiques, il fut impossible de fermer les yeux de sa dépouille mortelle et c’est donc comme Philippe IV le Bel, « les yeux grands ouverts », que cet auteur inclassable et cependant important de notre littérature entra dans l’Eternité.
Mais Schwob est aussi né sous le signe de la Littérature puisque sa famille fréquente Théodore de Banville, Théophile Gautier et beaucoup d’autres et que son oncle maternel, Léon Cahun, n’est autre que bibliothécaire en chef de la Bibliothèque Mazarine. Sont-ce ces auspices si favorables qui font du jeune garçon ce que nous appellerions un surdoué, capable de maîtriser l’allemand et l’anglais dès l’âge de 10 ans ? Devenu adulte, cet infatigable érudit s’intéressera de même autant à Henrik Ibsen qu’à la « Salomé » d’Oscar Wilde, aux poésies de Walt Whitman comme à celles de Maeterlinck, à Colette comme à Mallarmé.
En-dehors de son amour pour Marguerite Moreno, sa grande passion, celle qu’il conserva tout au long de sa courte vie – puisqu’il mourut à l’âge de 37 ans – et dont le virus lui avait été transmis par son oncle Cahun, demeura à François Villon et à son œuvre. Et ce n’est pas un hasard si son premier vrai livre, co-rédigé avec un ami qui devait se suicider quelques jours après la parution de l’ouvrage, s’intitule : « Etude sur l’argot français. » Un an plus tard, Schwob donnera à "La Revue des Deux Mondes" une biographie serrée du grand poète.
En parallèle, il correspond avec Robert-Louis Stevenson, dont il a lu la « Treasure Island » dans le texte avant de partir pour le service militaire. Ce roman, devenu un classique de la littérature américaine, lui a en effet laissé une impression ineffaçable. A tel point que, quelques années plus tard, il en assurera la première traduction dans notre langue. Lui-même commence à publier régulièrement, notamment dans « L’Echo de Paris » où se côtoient en cette fin de siècle Jean Lorrain, Mirbeau, Maupassant, Jules Renard – qui fit de Schwob l’un des personnages de son « Journal » - et bien d’autres.
1891 et 1892 peuvent être considérées comme des « années Schwob » en ce sens que l’écrivain sort alors et coup sur coup ses deux premiers recueils de contes : « Cœur double », dédié à Stevenson, et « Le Roi au Masque d’Or." Les textes qu’on y trouve sont marqués pour les uns au coin d’un réalisme qui prend ses sources dans la vie militaire menée par l’auteur à Vannes, au temps de son service ; ceux qui restent, où pointe l’oreille faunesque et sanglante du Fantastique, s’inspirent de textes antiques ou de chroniques judiciaires. L’influence de Edgar Allan Poe, celle aussi de Twain et, bien sûr, celle de Stevenson (lui-même auteur, on a trop tendance à l’oublier devant le formidable succès de « L’Ile au Trésor », de grandes nouvelles fantastiques) sont flagrantes.
1894 est aussi une autre « année Shwob », où paraît l’inclassable « Livre de Monelle », dont le succès fut extrême et qui, aux yeux de Colette, resta toujours le meilleur des recueils publiés par son grand ami. A la même époque hélas ! se manifestent les premiers symptômes de la maladie (gastrique ou intestinale, on ne sait trop) qui aura raison de Shwob en 1905. Pour maintenir le rythme de ses études (car, quelque part, il fut un perpétuel étudiant, toujours avide de lire plus et d’en savoir plus) comme celui de ses productions, peut-être détraqué sur le plan du sommeil, Schwob avait pris l’habitude – comme Jean Lorrain – de s’adonner à des drogues comme l’opium et l’éther. On pense aujourd’hui que cette addiction a joué dans les progrès foudroyants de sa maladie.
Alors qu’il travaille à la traduction de « Moll Flanders » de Daniel Defoë, Schwob, comme jadis pour « L’Ecornifleur » de Jules Renard, part en lutte pour que soit représentée une pièce du dramaturge élizabéthain John Ford. Ce qui lui donne l’occasion de rencontrer Marguerite Moréno, dont il tombe éperdument amoureux et qui deviendra son épouse en 1900.
En 1896, c’est « La Croisade des Enfants », hallucinant récit à plusieurs voix contant le tragique destin de ces enfants qui partirent pour les Croisades de l’an Mil et n’en revinrent jamais. L’accueil de la presse comme du public est excellent mais Schwob doit entrer à l’hôpital où il ne subira pas moins de cinq opérations particulièrement pénibles et qui ne parviendront à prolonger son existence que d’une dizaine d’années. A compter de ce jour, son addiction aux drogues devient complète. Pire : la bienheureuse morphine lui est désormais nécessaire.
Après son mariage, à l’aube du XXème siècle, Schwob entreprend un vaste tour du monde où, toujours, sa santé de plus en plus délabrée le rattrape. Contraint à de fréquents retours à Paris, il voit cependant les Samoas, l’Italie, la Suisse … Et puis, en 1905, c’est l’étape finale : Marcel Schwob meurt. Fait qu’il n’eût pas manqué de mentionner dans ses contes fantastiques, il fut impossible de fermer les yeux de sa dépouille mortelle et c’est donc comme Philippe IV le Bel, « les yeux grands ouverts », que cet auteur inclassable et cependant important de notre littérature entra dans l’Eternité.
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