jeudi 18 septembre 2014

La Bague d'Annibal - Jules Barbey d'Aurevilly

Préface, Chronologie, Notes & Variantes, Bibliographie : Jacques Petit

ISBN : Non Indiqué

Extraits
Personnages



Résolument autobiographique, ce texte, scindé en une foule de mini-chapitres ou alors de stances - mais des stances en prose - met un point final à la liaison impossible que Barbey entretint dans sa jeunesse normande avec sa cousine Louise.
Les familles, dans leur ensemble, étaient contre l'idée de tout mariage entre ce garçon qui n'avait pas encore une vision bien nette de ce qu'il allait faire dans la vie et cette fille sage, promise dès la naissance à un avenir aussi paisible que bourgeois. Les jeunes gens semblent pourtant avoir osé aller plus loin que l'amour platonique et on prétend même que, alors que Barbey vivait à Caen, Louise se cachait pour se rendre chez lui. Vérité ou fantasme, la fin de l'intrigue fut douloureuse : Louise se maria bien sagement et Jules se retira dans son coin, léchant ses plaies et rêvant de gloire littéraire. Si la première ne fut pas, en définitive, si perturbée qu'on eût pu s'y attendre, le second, en revanche, ne s'en remit jamais tout à fait.

Pour cette incarnation-ci du dandy, l'écrivain, aveuglé par la jeunesse et probablement par ses goûts naturels - il est vrai que, quand on vous baptise Jules-Amédée, on doit se sentir marqué pour la vie    - s'est choisi le fabuleux alias d'Aloys de Synarose - non, ce n'est pas une défaillance de votre ordinateur et inutile de prendre rendez-vous chez un ophtalmologue, c'est bien le nom du héros.    Louise, pour sa part, s'est muée en une Joséphine assez bêtasse et cependant assez finaude quand ses intérêts sont en jeu, très coquette bien sûr et, pour couronner le tout, ardente admiratrice de Mme de Staël. Dans les parages, attendant l'heure de Vénus, rôde le futur époux en titre, un certain Baudoin d'Artinel, dont la silhouette bedonnante et le crâne semi-chauve n'ont rien de bien romantiques. Fort heureusement, au contraire d'Aloys, ce monsieur a des rentes.

S'ouvre alors un petit ballet, fait de déclarations passionnées et de piques tout aussi furieuses entre Joséphine et Aloys tandis que, en coulisses, Baudoin se répète que cette jeune Joséphine est vraiment bien mignonne - de plus, côté héritage, elle a des espérances. Et ce qui devait arriver arrive : Louise finit par se ranger à l'opinion de sa famille et elle choisit d'Artinel. Barbey se livrant ici à un règlement de comptes dans les formes les plus cruelles, l'héroïne va jusqu'à attirer d'Artinel dans sa chambre en le faisant passer par le balcon : c'est un peu Roméo et Juliette avec la rouerie de Joséphine et les rhumatismes du pauvre Baudoin en plus. Qui pis est, Aloys, tapi dans l'ombre, ne perd rien de l'incroyable ascension de son heureux rival.

Heureux, jusqu'à quand ? ... Car avec une épouse si avisée ...

Oeuvre un peu biscornue, oeuvre que, à sa parution en feuilleton, dévora, dit-on, la bonne société de Caen, pressée de mettre des noms de scandale sur tel ou tel personnage "à clef", "La Bague d'Annibal" est elle aussi un bien joli exercice littéraire, au ton plaisant et caustique, avec une pointe de ténèbres byroniens qui risque de ne guère toucher le lecteur français. A lire. Mais seulement quand vous en aurez le temps.

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