lundi 15 septembre 2014

Jean Giono

Fils d'un cordonnier d'origine italienne que ses tendances anarchistes n'empêchaient pas de lire la Bible, Jean Giono est né et mort à Manosque. Les ressources financières de la famille étant assez faibles, le petit Jean arrêtera ses études à seize ans mais n'en continuera pas moins à s'instruire en autodidacte. Six ans plus tard, le jeune homme connaîtra Verdun, puis le Mt Kemmel et voit nombre de ses camarades gazés ou tués à ses côtés. Cette expérience difficilement inoubliable l'oriente vers un pacifisme résolu qui lui vaudra bien évidemment d'être inquiété par les autorités aussi bien en 1939 qu'en 1945 !

C'est "Colline", premier volet de sa trilogie panthéiste, qui lui apporte la gloire en 1929 - ainsi que le prix américain Brentano. Un an plus tard, il reçoit le prix Northcliffe pour "Un de Baumugnes" dont Marcel Pagnol s'inspira par la suite pour son "Angèle." Enfin, parut "Regain" qui sera également adapté par Pagnol.

Si Giono adhéra un temps très bref à l'"Association des écrivains et artistes révolutionnaires" d'obédience communiste, il était trop indépendant et trop lucide pour y rester longtemps. La défection de ce brillant élément aura sans doute une influence sur l'emprisonnement de Giono en septembre 1944 bien que jamais, dans ses paroles ou dans ses écrits, il n'eût jamais manifesté un soutien quelconque à Vichy, encore moins au nazisme. "Marchez seul, que votre lumière vous suffise !" conseillait cet orgueilleux superbe que les forces de Libération se virent finalement contraintes de relâcher en 1945 sans avoir réussi à l'inculper de sympathie avec l'occupant.

Mais ses ennemis n'en avaient pas fini avec lui et le "Comité national des écrivains", issu de la Résistance et qui ne fut, sur bien des plans, qu'une sinistre mascarade, l'interdit de publication en France en l'inscrivant sur sa liste noire.
En 1947 cependant, Giono parvient à faire publier "Un Roi sans divertissement" et cette publication marque la fin de sa mise au placard. Ce roman annonce la dernière manière, plus amère, de l'écrivain dont fait également partie le fameux "Hussard sur le Toit."

Ecrivain au verbe souple et doré par le soleil de sa Provence natale, Giono a quelque chose de païen et de joyeux ("Il faut à toute force être heureux", disait-il encore) dont les déceptions de l'après-guerre et l'écoulement des années ne sont pas venus à bout. En dépit des apparences - son style est simple, très simple - c'est probablement l'un des plus grands écrivains français du XXème siècle. Sans naïveté aucune, il a chanté la Nature telle qu'elle est : avec ses bons côtés et ses splendeurs incontestables (sa trilogie panthéiste par exemple) mais aussi dans toutes ses horreurs et son aveuglement, prête à fouler les hommes aux pieds (le dérèglement du Roi sans divertissement, le choléra où apparaît le Hussard). Mieux : il l'a fait en digne héritier de la manière antique d'un Virgile ou d'un Ovide, avec pudeur, justesse, simplicité et pourtant éblouissement.

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