mercredi 24 septembre 2014

Richard Aldington (I)

8 juillet 1892, Portsmouth - Hampshire (Grande-Bretagne) : naissance d'Edward Godfree Aldington, dit Richard Aldington, poète, biographe & romancier.

Fils d'un homme de loi, il fait ses études au Collège de Douvres avant d'entrer à l'Université de Londres. Faute de moyens financiers suffisants, il ne peut malheureusement y poursuivre sa seconde année.

A dix-neuf ans, il rencontre la poétesse et mémorialiste américaine proche du courant Imagiste et d'Ezra Pound, Hilda Doolittle, dite H. D.. Ils se marient deux ans plus tard.

Les poèmes d'Aldington sont associés, eux aussi, au groupe Imagiste et on les retrouve dans l'anthologie inaugurale du mouvement, "Des Imagistes", publiée en 1914. On rapporte que, dès 1912, Pound avait forgé le terme d'"imagistes" à l'intention de H. D. et de son compagnon. A cette époque, les textes d'Aldington sont en vers libres non rimés alors que, plus tard, la cadence s'en fera longue et sensuelle, avec des images puissantes et détaillées.

Mais avant la Grande guerre, Aldington n'est encore qu'un poète parmi les autres, dans le cercle du proto-Imagiste T. E. Hulme. Dans sa biographie de Hulme, Robert Ferguson évoquera le jeune homme, alors trop prude, trop timide, pour manifester son approbation envers les opinions parfois plutôt rudes de Hulme, notamment sur les femmes. Adlington partage tout de même avec Hulme la certitude que l'expérience sur le vers japonais traditionnel peut apporter beaucoup à l'avant-garde littéraire anglaise et il se rend souvent au British Museum pour étudier les estampes de brocart dites "Nishiki-e" ou "Edo-e" qui illustrent souvent les anciens textes poétiques nippons.
Il collabore aussi avec Ford Maddox Ford, notamment pour un texte de propagande destiné à une commission gouvernementale en 1914. Il accepte de se faire dicter par l'Américain le texte de "The Good Soldier", que sa femme trouve, pour sa part, trop atroce.

En 1915, les Aldington déménagent, quittant Holland Park, trop proche de Pound, pour Hampstead, lieu de résidence de D. H. Lawrence et de son épouse, Frieda. Mais leur amitié pâtira d'intérêts romantiques divergents et aussi de la naissance de leur enfant mort-né.

Entre 1914 et 1916, Aldington est l'un des rédacteurs littéraires du périodique moderniste The Egoist. Il en est aussi le rédacteur-adjoint aux côtés de Leonard Compton-Rickett et sous l'autorité de la philosophe et féministe Dora Marsden. Le fossé qui s'installera peu à peu entre les Imagistes et les Futuristes sera dû en partie à une critique négative d'Aldington, qui n'avait pas aimé un poème de Filippo Marinetti.


 Aldington rejoint l'Armée en 1916. Il fait partie du régiment Royal Sussex et, en 1917, est blessé sur le front occidental. Il ne se remettra jamais tout à fait des expériences vécues à la guerre et l'on pense aujourd'hui qu'il a peut-être souffert d'un stress post-traumatique.

Pendant qu'il était au front, sa femme s'était beaucoup investie dans une relation amoureuse avec D. H. Lawrence. Après la fin du conflit, Aldington tente de replâtrer leur mariage mais H. D. est alors impliquée à fond dans une liaison saphique avec l'écrivain Bryher, qui n'est autre que la fille du riche armateur et financier John Ellerman. Finalement, Aldington et sa femme se séparent, chacun retentant sa chance avec un autre partenaire. Toutefois, ils ne divorceront pas avant 1938 et resteront d'ailleurs bons amis.

A cette époque, Aldington, impressionné par le talent du poète américain T. S. Eliot, va aider celui-ci en bien des façons, notamment en persuadant Harriet Shaw Weaver de le prendre comme son successeur à The Egoist. Il écrit aussi un texte de présentation du dramaturge et poète et de son oeuvre qui paraît dans le supplément littéraire du Times. Avec lady Ottoline Morrell, célèbre mécène de l'époque, l'éditeur Leonard Woolf (également époux de Virginia) et Harry Norton, il fait tout pour "enlever Eliot à sa banque." En effet, l'Américain travaille chez Lloyd's : or, nombre de ses amis veulent à tous prix le voir se consacrer uniquement à la poésie. Ces manoeuvres se soldent par un échec : Eliot n'y récolte qu'un "don" de 50 livres et une mauvaise publicité dans le Liverpool Post tandis que Lytton Strachey se gausse avec esprit.

Au milieu des années vingt, Aldington tente de répondre au nouveau style de poésie initié par "The Waste Land / La Terre Vaine" et donne "A Fool l' the Forest." Mais l'année suivante, il semble sombrer dans la dépression : tout à coup, sa poésie lui semble vaine et inutile et il devient tout simplement jaloux de la célébrité d'Eliot.

Pour un homme qui, à peine quatre ans plus tôt, s'occupait du chat d'Eliot dans son cottage près de Reading, et à qui Eliot confiait entre autres son auto-diagnostic d'aboulie, Aldington a viré du tout au tout. Dans le mariage d'Eliiot, il va jusqu'à prendre ouvertement le parti de Vivienne, sa femme, et se moque du mari qu'il nomme "Jeremy Cibber" dans "Stepping Heavneward : A Record", sorti à Florence en 1931.

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